Wrong Prey { J o n g I l }

Ayant l’habitude d’être enfermée, la harpie a le crochetage dans le sang. Ce n’est pas une entreprise si compliquée une fois qu’on a compris le système ; qu’il y ait plusieurs verrous à crocheter est, en revanche, une nouveauté qui la pousse à maudire Min Ho sur plusieurs générations, quitte à ce que lesdites générations deviennent éventuellement les siennes. Rien que l’idée la fait frissonner de dégoût ; mais, bien vite, elle reporte son attention pleine et entière sur cette foutue porte qui lui résiste et la sépare du monde extérieur et de son prochain goûter. Car il faudra bien que sa famille et son fiancé forcé se fassent à l’idée : elle a besoin de sang. De plus de sang que ce qu’il y a dans les poches qu’ils lui apportent généreusement.

Clic.

D’un dernier mouvement de son crochet improvisé, d’une pression sur la poignée de la porte, cette dernière s’ouvre et laisse passer une Haru excitée.

La suite reste floue dans la tête de la brune qui, trop prise par sa faim dévorante, ne se soucie pas des chemins empruntés. Elle se contente de se promener dans les rues de Séoul tout en esquivant avec soin les artères trop fréquentées. Finalement, elle se dirige vers un mur - un pied, deux pieds, elle grimpe d’une prise dans les craquelures de la paroi ; se retrouvant sur un premier toit, elle reprend son chemin en hauteur, devenue experte en parkour grâce à la vitesse surnaturelle que lui confère sa nature, lui donnant un élan auquel les humains normaux ne peuvent prétendre.

De là, elle prend le poul de la ville sous la lueur orangée du crépuscule. Les magasins qui ferment leurs portes, les gens qui se pressent pour rejoindre leur petite vie de famille bien rangée, ceux qui se préparent pour une sortie nocturne bien méritée. Une vie si simple que, dans le fond de son petit palpitant en miettes, elle envie, elle jalouse, elle excècre. La colère brille aussitôt au fond de ses yeux qui se colorent petit à petit d’un bleu hors du commun tandis qu’elle cherche du regard une âme en peine qui évoluerait en solitaire dans les ruelles veineuses.

Et là, un cœur qui bat. Une lente symphonie qui s’immisce à travers tout son être alors qu’elle descend d’un étage, puis de deux, suivant avec soin la silhouette sombre qui évolue à travers les veines oubliées de la métropole. Bientôt, elle pourra jouer avec elle ; mais d’abord, elle espère que cet homme va s’éloigner encore un peu plus de la civilisation, ce qu’il fait sans même sembler se poser de questions. Est-il inconscient, avec toutes les rumeurs d’attaques d’animaux qui courent actuellement ? Les maudits, ses semblables, qui se révèlent à un monde qui refuse d’admettre leur existence pourtant bien réelle. Et si ce n’était qu’eux… !

Mais finies, les réflexions philosophiques. L’heure du dîner a sonné.

Se laissant tomber au sol dans le dos de l’homme encore inconscient de sa présence - suppose-t-elle, tout du moins -, elle s’approche à une vitesse incroyable et enlace l’inconnu de ses bras qui n’ont pas encore commencé leur transformation, contrairement aux crocs qui ornent déjà sa lippe inférieure. « Hello Oppa~ tu es seul ? C’est dommage. Tu voudrais pas faire un bout de route avec moi ? Personnellement je suis toute seule, et j’ai un peu peur… » Tu parles. Comme si elle n’était pas déjà louche dans sa façon de l’aborder - mais il ne faudrait pas qu’il prenne la tangente tout de suite, ça risque de gâcher le goût du sang qu’elle peut entendre couler dans son corps puissant. Peut-être trop puissant pour elle ? Non, elle est suffisamment agile pour se défendre si ce dernier décide de lui résister.

Aujourd'hui c'est une journée assez contraignante pour Jong Il, lui qui pensait pouvoir aller chasser tranquillement ce soir, ses plans tombent à l'eau. Pourquoi ? Car il a sur les bras plusieurs cadavres à faire parler. C'est sans doute pour ça que le brun n'a pas pris le temps de déjeuner, non, il carbure au café depuis ce matin 8 heure. C'est sans doute pour ça que le brun n'a pas pris le temps de déjeuner, non, il carbure au café depuis ce matin 8 heure. Puis sincèrement qui voudrait manger après avoir joué avec autant de cadavres ? Nous sommes d'accord... C'est donc au coucher du soleil que ce dernier quitte les lieux. N'ayant pas fini de faire parler les cadavres, il sait très bien qu'une bonne nuit de sommeil l'aidera à avoir l'esprit clair. Sauf qu'avant tout ça, son corps réclame un repas et de préférence consistant.

Chose qu'il ne tarde pas à faire en se rendant d'abord dans un restaurant non loin de son lieu de travail, étant un habitué des lieux il salut la responsable et son mari avant de se mettre à table. N'ayant pas besoin de prendre le menu, il remercie la serveuse qui vient lui déposer un verre d'eau tout en prenant sa commande. Profitant du calme, il décide de sortir son portable et d'aller lire ses mails levant les yeux vers la fenêtre, il regarde le soleil doucement se coucher pour faire place à la lune qui ne tarde pas à illuminer les rues de la ville alors que l'obscurité commence à venir. Poussant un soupir, il est vite sorti de ses pensées par la serveuse qui vient déposer son plat sur la table en souriant. Mangeant tranquillement tout en voyant le restaurant se remplir petit à petit, il reste dans son coin, silencieux, comme à son habitude, il se contente de manger son plat et de partir.

C'est une fois dehors qu'il lâche un soupir de bien-être, c'est agréable, il ne fait pas froid, bien au contraire... Marchant tranquillement pour aller chez lui, il remarque au bout de quelques minutes quelque chose, ou plutôt quelqu'un. Oui, il en est certain, il se fait suivre, ne se retournant pas pour ne pas faire comprendre à la personne qui le traque qu'elle est démasquée, il se contente de faire comme si de rien n'était. Prenant cependant le soin d'emprunter des rues peu fréquentées pensant devoir continuer ce petit jeu encore quelques minutes il est très surpris lorsqu'en quelques secondes, il se retrouve avec une inconnue qui.... L'enlace ?! Une grimace de dégoût apparaît sur son visage alors qu'il se dégage assez facilement de son emprise et sans perdre un instant, il vient porter sa main à sa gorge tout en la plaquant contre un mur tout en la détaillant sans douter un instant de l'identité de la jeune femme.

"Moi qui pensais ne pas chasser ce soir"

Son regard est froid, il essaie de la jauger, sachant très bien que sans armes, il est en position de faiblesse, mais ça, elle n'est pas censée le savoir non ? Elle n'est pas obligé de savoir qu'il n'a qu'un pauvre revolver sur lui.

La harpie ne cherche pas à retenir sa proie entre ses bras fins - bien au contraire, elle écarte ces derniers, lui laissant même le champ libre pour se dégager de son emprise malsaine. Mauvaise décision. L’instant d’après, prise par surprise par la rapidité de réaction de l’homme, la brune écarquille ses yeux d’un bleu saisissant tandis que ce dernier l’attrape par la gorge, la plaquant de force contre le mur derrière elle. Suffocation. Avec tout autant, sinon plus de rapidité, elle recroqueville ses bras autour de celui de l’inconnu, se saisissant de la main envahissante de toute la force de ses griffes pour tenter de s’en dégager ; peine perdue - elle a pour elle l’agilité, mais on ne peut pas en dire autant de la force. « Ya, Ahjussi ! » qu’elle martèle en se débattant furieusement contre la pierre avant de se calmer soudainement, plongeant son regard dans celui de l’inconnu.

« Tu vas oublier pourquoi tu m’agresses. » scande-t-elle d’une voix sifflante, profitant clairement du fait qu’il la jauge intensément pour l’hypnotiser sans la moindre honte. Oh, rien de bien profond, ni de très important. Juste une pichenette sur le cerveau de l’humain. Elle sait que ça ne suffira pas nécessairement à le faire lâcher prise, mais profite des quelques secondes durant lesquelles ses doigts se desserrent dans le doute instillé pour se débattre une fois de plus et se libérer de sa poigne, s’éloignant à toute vitesse pour mieux l’observer d’un peu plus loin, prête à s’esquiver à tout moment. « Erreur de débutant. Ne jamais laisser mes semblables te regarder dans les yeux, chasseur. » Trop fière pour relever ses propres erreurs qui, pour le coup, sont trop nombreuses pour être nettement dénombrées.

Trop fière pour partir.

Elle pourrait pourtant stopper net la rencontre et se contenter de filer à toute allure au travers des rues et ruelles séouliennes pour se trouver une victime moins compliquée à gérer mais tant sa curiosité que son orgueil sont maintenant piqués. Puis disons-le franchement, Haru est une petite conne. « Ce qui, maintenant que j’y pense, me fait remettre en question le fait que tu puisses simplement penser. » La coréenne commence à se déplacer sur le côté, contournant sa proie tout en le narguant d’une voix rendue rauque par l’excitation et la faim. Jouer avec les nerfs d’un chasseur est toujours une expérience très drôle et, maintenant qu’elle est tendue comme la corde d’un arc, il ne pourra plus la prendre par surprise, alors pourquoi pas après tout ?

« Mais vas-y, je t’en prie. Essaye de me chasser. Je t’attends, tu sais ? » Petite pique supplémentaire pour lui rappeler qu’à ses yeux, il est lent, beaucoup trop lent, tant pour réagir que pour l’atteindre réellement, pas tant qu’elle ne lui en laisse pas l’occasion - qu’elle lui donnera, s’il se prête au jeu, parce que la créature aime un peu trop le risque pour se contenter d’esquiver. « Tu as un nom, Ahjussi ? » Croisant les bras, elle le regarde, le jauge à son tour, faisant glisser ses griffes sur l’obscur tissu qui recouvre sa peau laiteuse. D’un autre côté, se dit-elle, il peut très bien transporter des armes, ce qui rendrait la situation beaucoup plus risquée pour elle.

Mieux vaut observer avant de tenter une nouvelle approche.

Comprenant rapidement qu'il ne doit pas la regarder dans les yeux lorsqu'il se sent confus, il fronce les sourcils affaiblit pour ce qui semblerait une attaque. Merde, comment est ce qu'il a pu se faire avoir de cette manière ? Une erreur de débutant qui lui coûte cher, car voilà que la brune se retrouve hors de son emprise. Se pressant pour lui balancer son erreur dans la figure il ne peut que sourire face à cette constatation que même son ennemi semble avoir fait lui aussi. Tournant la tête, il se contente de la regarder et comprend tout de suite que comme pour la plupart des cibles qu'il traque, il ne doit en aucun se fier à son apparence, chose qui l'amuse et le fait sourire. Comprenant qu'il ne doit pas la fixer dans les yeux sous peine de retrouver dans une situation assez délicate, il décide de baisser son regard plus bas, au niveau de son cou alors que cette dernière ne tarde pas à reprendre la parole. Son nom ? Esquissant un sourire et levant son regard vers le sien quelques secondes, il ne tarde pas à reprendre la parole et de lui lancer de son habituelle ton glaçant.

"Présente-toi avant de faire ce genre de demandes"

Essayant de gagner du temps, il regarde autour de lui, merde comment est ce qu'il est censé faire avec seulement un revolver ? Merde, putain, fait chier, voilà ce qu'il pense alors qu'il comprend le danger de la situation. Une situation qui le fait cependant sourire alors qu'il glisse sa main dans sa poche non pas pour prendre son arme, mais bien pour appeler des renforts. Si Jong Il est conscient de ses capacités, il est aussi conscient de ses limites. C'est donc sans trop de difficultés qu'il appuie sur son bipeur, appelant n'importe quel chasseur à la rescousse.

"Tu devrais rentrer chez toi."

Est-ce qu'il lui donne un vrai conseil ? Non, il veut juste gagner du temps, et c'est sans doute pour ça qu'il essaie de tenir la conversation avec elle. Chose qu'il déteste faire, parler avec ce qu'il est censé capturer et disséquer, c'est bien quelque chose qu'il lui hérisse le poil. Avançant d'un pas, car sa fierté et son dégoût pour les maudits le poussent à ne pas rester inactif, il ne tarde pas à reprendre la parole et à lui dire.

"Tu penses rentrer en un seul morceau ce soir ?"

Et n'attendant pas sa réponse, il sort son arme à feu et tire une première balle avant de reculer de quelques pas, non, il ne cherche pas à fuir, il veut sortir de cette ruelle et qui sait peut être qu'il trouvera quelque chose qui pourrait l'aider. Une barre en fer, un morceau de bois, n'importe quoi qui pourrait lui servir d'armes et qui pourrait lui faire économiser des balles.